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La Shoah en France et l'occupation italienne du 11 novembre 1942 au 8 septembre 1943 : Les Italiens sauveurs de Juifs contre les Allemands, contre l'État Français et contre Mussolini / Serge Klarsfeld
Livre
Edité par Éditions FFDJF - 2023
On oublie trop souvent ou l'on ne se souvient plus que pendant dix mois la IVe armée italienne a occupé en totalité ou en partie une dizaine de départements du Sud-Est de la France. Si le pouvoir fasciste avait envisagé l'annexion de Nice à l'Italie, la situation militaire de l'Axe en perdition dans le nord de l'Afrique l'avait certainement dégrisé et le débarquement en Sicile précédait de peu la chute de Mussolini en juillet 1943, lâché par le grand Conseil fasciste et arrêté sur ordre du roi. En 1942, les diplomates italiens en France avaient protégé les Juifs italiens de la déportation. En 1943, avec le soutien des militaires, ils ont résisté aux pressions du gouvernement Laval, de l'appareil policier SS d'Himmler et de Ribbentrop ainsi qu'à celle de Mussolini lui-même qui était prêt à céder et à livrer à la police française tous les juifs de sa zone d'occupation. Jusqu'à ce que les Allemands envahissent totalement la zone italienne le 8 septembre 1943, diplomates et militaires italiens ont permis aux Juifs de leur zone de vivre presque normalement dans une bulle exceptionnelle dont ils savaient qu'elle pouvait crever d'un jour à l'autre. Cette résistance italienne à l'inhumanité de l'époque vis-à-vis des Juifs se vérifiait également dans leurs zones d'occupation en Grèce et en Yougoslavie. On doit à cette résistance le fait que les Juifs de la zone italienne ne furent pas raflés massivement par la police française et que l'État français de Vichy fut freiné dans sa collaboration policière avec les Allemands en zone Nord et en zone Sud à cause du refus du partenaire de l'Axe de s'associer à la politique d'extermination des Juifs. Les Italiens ont eu la force morale de respecter la dignité humaine des Juifs et leur existence physique, de les protéger tant qu'ils ont pu le faire dans leur zone et de gagner pour eux sur tout le territoire un répit précieux pour leur survie dans le déroulement de la solution finale. Ce n'est pas un hasard si l'ancêtre du Mémorial de la Shoah, le Centre de Documentation Juive Contemporaine a été créé à Grenoble en avril 1943 en zone italienne et c'est à juste titre qu'un des premiers ouvrages du CDJC, celui de Léon Poliakov, a rendu hommage à l'humanité des Italiens dans "La Condition des Juifs en France sous l'occupation italienne".