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Rousseau : lectures contemporaines et théories de la justice : première conférence du cycle philosophique sur la Morale / rencontre avec Céline Spector [DVD]
proposé par la Société Alpine de PhilosophieVidéo
Edité par Ville de Grenoble. Grenoble - 2008
"La théorie de la justice élaborée par Rousseau dans le Contrat social et au livre IV de L’Emile a donné lieu à des lectures contemporaines de philosophes, qui les utilisent au service de leurs propres théories de la justice. Cette conférence entend suivre ces interprétations afin d’éclairer simultanément la philosophie politique de Rousseau (ses tensions, voire ses apories) et les grands enjeux des théories contemporaines de la justice. La réflexion contemporaine prend généralement pour point de départ la difficulté de penser l’unité du social dans une société gouvernée par le pluralisme moral: diversité irréductible des visions du monde, divergence entre les conceptions de la « vie bonne ». La question décisive, dès lors, est celle des rapports entre politique et éthique, entre le juste et le bien. Faut-il considérer les conceptions du Bien comme « privées » et les exclure de l’espace public, celui de la délibération sur le Juste? Doit-on considérer au contraire que les conceptions de la vie bonne sont ce qui constitue notre identité en tant qu’hommes et en tant que citoyens, et que l’idéal d’autonomie défendue par les libéraux est insuffisant dès lors qu’il faut former un « sens de la justice »? Il est éclairant, afin d’y répondre, de partir des lectures consacrées à Rousseau dans l’oeuvre de John Rawls, de Charles Taylor, de Michaël Walzer ou de Jürgen Habermas, qui théorisent la question des rapports entre le Juste et le Bien dans des sociétés caractérisées par le pluralisme moral. La confrontation entre la lecture rawlsienne, la lecture communautarienne et la lecture habermassienne de Rousseau invite à se pencher sur une difficulté majeure rencontrée par les théories contemporaines de la justice: celle de la formation d’un « sens de la justice » destiné à appuyer la théorie politique par une pratique des sentiments moraux. L’enjeu philosophique de cette lecture apparaît de la sorte: peut-on concevoir une théorie « pure » de la politique et de la justice qui laisse se développer dans son extériorité les conceptions qu’ont les citoyens de la vie bonne? Doit-on considérer que le citoyen de l’Etat moderne n’a besoin que d’être autonome pour être libre, qu’il doit « seulement » se donner à lui-même ses lois, ou doit-on penser que la liberté des modernes suppose une conception plus exigeante de la citoyenneté, qui inclut certaines vertus, et, le cas échéant, lesquelles? Ces vertus politiques sont-elles aussi, en un sens, des vertus morales et la politique peut-elle faire l’économie, à cet égard, d’une théorie des sentiments moraux ?»