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Addictions : quand le cerveau perd le contrôle
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On présente souvent l'histoire comme la libération progressive des hommes vis-à-vis des contraintes environnementales et biologiques. Cette libération semble avoir atteint son apogée avec l’émergence récente des sociétés démocratiques modernes de consommation qui offrent aux individus toujours plus de liberté, de choix, de gratification immédiate... Mais cette liberté a un coût : l’addiction, qui peut être définie comme une dépendance par opposition à l’indépendance associée à la liberté. Historiquement, l’addiction, en tant que concept médical, est née au moment même où la liberté poussa son premier cri, à la fin du XVIIIe siècle. Depuis, elle a servi de repoussoir dans toutes les grandes discussions philosophiques et scientifiques sur la liberté, le choix ou le libre arbitre, jusqu’aux recherches les plus récentes sur le cerveau et la prise de décision. Inversement, l’addiction pose invariablement la question du choix et du libre arbitre : l’addict serait celui ou celle qui a perdu sa liberté en devenant esclave d’une substance ou d’un comportement.Il/elle serait l’image en miroir de l’homme libre : il ne choisit plus rationnellement mais obéit contre son gré à des pulsions qui deviennent alors des compulsions. Mais comment cette perte de contrôle est-elle possible, après cette conquête historique de la liberté ? Aujourd’hui, les sociétés modernes de consommation sont très préoccupées par l’addiction, dont la prévalence et les différentes formes sont en augmentation. Mais les réponses qu’elles apportent au problème de l’addiction sont très ambivalentes et conflictuelles, pour ne pas dire irrationnelles. Tantôt elles prohibent, interdisent et punissent, tantôt elles préviennent, soignent et traitent, la ligne de démarcation entre ces deux réponses opposées étant floue. Quel éclairage peut apporter la recherche scientifique sur ce problème ? Ce numéro spécial consacré à l’addiction tente de répondre à cette question. Il regroupe des chercheurs de renom qui ont contribué aux grandes avancées épidémiologiques, cliniques et neurobiologiques récentes sur le sujet. Ils y abordent tous les grands enjeux actuels, sous un angle principalement biologique. Qu’est-ce que l’addiction au juste ? Doit-on parler de l’addiction au singulier ou au pluriel ? Peut-on aussi devenir addict aux « petits plaisirs » de la vie, au sucre par exemple ? L’addiction est-elle le propre de l’homme ? Sommes-nous tous égaux face à elle ? Et sinon, quel est le rôle respectif de la génétique, de l’histoire individuelle et de l’environnement dans la vulnérabilité face à l’addiction ? Comment la prise répétée de drogues change-t-elle durablement les synapses et les circuits cérébraux ? Existe-t-il un ou des mécanismes neuronaux communs aux différentes formes d’addiction ? Même si nous n’avons pas encore toutes les réponses, les connaissances acquises au cours des 20 dernières années permettent de mieux cerner la nature de l’addiction et de commencer à envisager de nouvelles pistes thérapeutiques pour toutes les personnes qui en sont affectées et souhaitent s’en sortir. (Editorial)
Qu’est-ce que l’addiction ?.
Addiction(s) ?.
Aux origines des addictions.
Jouer sur l’épigénétique pour contrer l’addiction à l’alcool.
Une brève histoire des modèles animaux de l’addiction.
Neurobiologie des mauvaises habitudes.
De la neuroadaptation à l’addiction.
Les nouvelles pistes thérapeutiques anti-addiction.
Voir la revue «Biofutur, 1982-»
Autres numéros de la revue «Biofutur»
n° 338 (décembre 2012) ; p. 24-51